Le Centre d’Orléans acquiert plusieurs lettres de Péguy

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Le 20/11/2013

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Le Centre Charles Péguy d’Orléans a pu acquérir plusieurs lettres de l’écrivain, lors d’une vente aux enchères le 14 novembre dernier à l’Hôtel Drouot à Paris. Les acquisitions sont essentiellement des documents manuscrits envoyés entre 1910 et 1914 à Blanche Raphaël, grand amour platonique de Péguy.

Figurent notamment ces lignes écrites le 16 août 1914, quelques jours avant sa mort : « Si je ne reviens pas, vous irez une fois par an à Chartres pour moi (...) ». Ces documents viennent enrichir un peu plus le Centre Péguy de la rue du Tabour
.

Voir en pièce jointe, en bas, l'article de la République du Centre (format pdf).






LES DOCUMENTS ACQUIS PAR LE CENTRE PEGUY



Lettre autographe signée à Mme Bernard (10 décembre 1911)

« J'ai l'impression qu'une guerre de quinze ans et plus va peut-être se résoudre en quelques semaines ; que nous avons un intérêt capital à avoir et les sujets de Desjardins et si on pouvait son cours à Sèvres... »



Poème autographe signé, à Blanche Raphaël (dimanche 17 décembre 1911)

Acrostiche de 7 quatrains : la première lettre de chaque quatrain donne le prénom : Blanche.

« Béni sois-tu coeur pur, / pour ta détresse ; / Béni sois-tu, coeur dur, / pour ta tendresse. Loué sois-tu copeur las, / pour ta bassesse; / loué sois-tu, coeur bas, pour ta hautesse, / ... Honni sois-tu, coeur double, / Ô faux ami; // Honni sois-tu, coeur trouble, / cher ennemi... »



Deux documents : billet autographe signé à Blanche Bernard (19 avril 1912) et lettre autographe signée à Blanche Bernard (20 mai 1912)

19/04 : « Vous me ferez penser demain à vous demander un conseil ferme sur un point important. »

20/05 : « trop fatigué pour travailler, trop fatigué même pour marcher, il ne reste plus qu'à tendre le dos et à attendre qu'il ne pleuve plus. Je suis comme un infirme dans un hôpital. »



Deux lettres autographes signées à Blanche Bernard (23 avril 1912 et 28 avril 1912)

23/04 : « J'ai l'impression que vous étiez soucieuse et que vous ne me tenez plus juste au courant de vos soucis ».

28/04 : « Ne me croyez point à Dieppe et sur les routes. Un télégramme de Claude... décommandait cette folle équipée ».



Deux lettres autographes signées à Blanche Bernard (21 et 23 août 1912)

21/08 : « Monsieur Bourgeois a dû vous dire comment nous avons été subitement mobilisés... je rentrerai de Paris... par le train de cinq heures un quart. »

23/08 : A propos de son fils : « Pierre est hors de danger c'était une diphtérie. On lui a fait deux piqûres... »



Lettre autographe signée avec post scriptum autographe signé également à Blanche Bernard (16 août 1914)

« ... Si je ne reviens pas, vous irez une fois par an à Chartres pour moi. Dès aujourd'hui vous joindrez aux deux prières que je vous ai demandées pour tous les jours les mêmes dans leur texte latin et une troisième en latin... » Il copie le Pater noster puis Ave Maria puis « quoiqu'il y ait, une fidélité éternelle mais une fidélité san deuil. Dieu m'a déjà tant donné... » En post scriptum il donne son adresse et ajoute: « pas un mot dans vos lettres qui soit des nouvelles politiques ou militaires. Les lettres... sont interceptées. Nous-mêmes n'avons pas le droit de dire où nous sommes. Ces mesures sont fort sages avant tout il ne faut pas renseigner l'ennemi... »



Lettre autographe signée à Blanche Bernard (22 août 1914)

« ... pendant toute une semaine nous avons entendu des canonnades intermittentes. Rien depuis vingt quatre heures. Nous avons l'impression que l'ennemi recule... santé parfaite... Une immense paix. Ce seul souci qu'au départ vous étiez moins appareillée que les autres pour ce qui allait se passer... »



Lettre autographe signée à Blanche Bernard (23 août 1914)

« Depuis mardi une immense paix dans une grande ferme abandonnée. J'y commande en chef un peloton de 120 hommes. Nous sommes en grande garde au milieu des bois. Depuis une semaine canonnades intermittentes. A vingt-cinq kilomètres. Mais aucunes nouvelles. Je reçois des lettres de tout le monde excepté les vôtres... »



Lot de 45 documents environ parmi lesquels :

Lettre autographe signée de M. Baudouin à M. Raphaël annonçant la mort de Péguy.

Lettre autographe signée de M. Baudouin à Blanche Bernard : « Péguy est à Villeroy au bout de la tranchée où sont ses hommes et les autres officiers. J'ai rapporté son mouchoir... ».

Carte de visite autographe signée de Charlotte Péguy à Blanche Bernard.

Article de journal sur la mort de Péguy, encart imprimé par des amis de Charles Péguy demandant aux abonnés d'affirmer leur fidélité à sa mémoire.



 



DETAILS DE LA VENTE



La vente comportait 27 lots composés de lettres et de billets datant des années 1911 à 1914. La Ville d'Orléans avait réservé à cette vente une enveloppe de 25 000 € mais en raison de la montée de la cote de Péguy à l’approche de son centenaire, les prix de vente ont largement dépassé les estimations. Le Centre d'Orléans a concentré ses efforts sur 9 lots de valeur. Deux de ces lots ont fait l’objet de préemptions de l’Etat au profit de la Ville d’Orléans.



Le Centre Charles Péguy d'Orléans était représenté par Aurélie Bonnet-Chavigny, sa directrice. Cette dernière était accompagnée de François Lenell, conservateur d’Etat au service Livre et Lecture du ministère de la Culture, de Claire Daudin, présidente de l'Amitié Charles Péguy et d'Odile Giraud-Péguy, petite-fille de l'écrivain.



La vente des lots de Péguy a duré environ 30 minutes.



Les documents acquis par le Centre Péguy seront accessibles aux visiteurs dans le courant de l'année 2014.



 



BLANCHE RAPHAEL



Blanche Raphaël est la fille de Gaston Raphaël, collaborateur juif de Péguy. Jeune agrégée d'anglais, elle  fréquente à partir de 1902 la boutique des Cahiers de la quinzaine. Le 30 juillet 1910, elle se marie avec Marcel Bernard, ami et admirateur de Péguy. Péguy éprouvera pour cette femme un amour qui restera platonique.

“(Péguy) choisit de combattre cette passion par fidélité à sa femme et à sa foi. Il en souffre beaucoup, comme en témoignent les quatrains de La Ballade du cœur qui a tant battu, demeurés longtemps inédits. Mais cet amour est aussi un ferment de sa pensée et de sa poésie, et ce renoncement une fidélité à soi-même, qui porte ses fruits”, estime Claire Daudin.

Michaël de Saint-Chéron parle d'un “amour à faire vaciller l’homme et le père de famille qu’il (Péguy) est, et qui a un sens du devoir et de la responsabilité devant le mariage proprement mystique, infrangible, l’engageant jusqu’à la mort même”.



 


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Par : Webmaster

Note : Note 5

Titre : Webmaster

Avis : Le sujet est évoqué dans un article de la République du Centre (édition en ligne datée du 23 novembre 2013)
Voir ici :
http://www.larep.fr/loiret/actualite/pays/orleans-metropole/2013/11/23/le-centre-peguy-vient-dacquerir-12-lettres-de-lecrivain-orleanais-envoyees-entre-1911-et-1914_1775422.html

Par : H.

Note : Note 5

Titre : anonyme

Avis : Il y a aussi la « Prière de confidence » parmi les « Cinq prières à Notre Dame de Chartres ». Ses 8 quatrains semblent exclusivement consacrés à cet épisode de la vie de Charles Péguy, en des termes que ses contemporains ne pouvaient pas comprendre, sauf à en être des confidents ou des témoins directs . Peu importe d’ailleurs : ici c’est le choix, douloureux, d’une voie, de préférence à une autre « Celle qui allait en contrebas » qui est, précisément, confié. Loin d’une dévotion mariale naïve, Péguy parle à la Vierge comme à sa propre mère, donc dans la posture du Christ. Il revendique d’être placé « dans l’axe de détresse ». Toute la prière vers Chartres revêt les aspects d’une Passion, mais cette partie, plus spécialement, ceux d’une « Imitation » (de Jésus Christ), terme aujourd’hui suranné, qu’on remplace , par l’invitation à « suivre le Christ », de sens exactement identique. On voit par là l’ambition, la modestie, l’humilité et l’audace de celui qui probablement voyait pour bientôt (le texte date de fin 1913) la fin d’un cheminement terrestre riche mais combien difficile, et la fière sollicitation d’un pardon, arguments à l’appui.